25 août 2025

Le renouveau des bourgognes sans sulfites ajoutés : des vins à la hauteur des plus grands ?

Les sulfites en bref : pourquoi certains vins s’en passent

Pour bien comprendre ce sujet, il est nécessaire de faire un petit détour afin d'aborder ce que sont les sulfites et pourquoi ils font tant parler d’eux dans le monde du vin. Les sulfites, ou SO2 (dioxyde de soufre), sont un additif utilisé de manière courante dans la vinification. Leur rôle principal ? Protéger le vin des oxydations et des déviations microbiologiques, ce qui permet de stabiliser le breuvage et d'assurer sa conservation.

Cependant, depuis quelques années, ces composés sont pointés du doigt pour leur impact possible sur la santé (maux de tête et intolérances chez certains) et sur le goût du vin, qu’ils peuvent, selon les détracteurs, standardiser. Afin de répondre à une demande croissante des consommateurs pour des vins plus “vrais”, certains vignerons optent donc pour des cuvées sans sulfites ajoutés ou en limitent drastiquement l’usage. Cela s'inscrit dans une démarche plus large, en faveur de pratiques respectueuses de l'environnement et d’une authenticité du terroir.

Bourgogne et vin nature : un mariage inattendu ?

La Bourgogne, avec ses appellations renommées comme Gevrey-Chambertin, Meursault ou Romanée-Conti, est traditionnellement perçue comme le bastion d’une viticulture classique, presque immuable. Ses vignerons travaillent depuis des siècles avec un savoir-faire d’orfèvre qui valorise exclusivement le chardonnay et le pinot noir, deux cépages exigeants. Alors, comment la philosophie « nature » a-t-elle fait son entrée dans ce temple du vin ?

Cela peut paraître surprenant, mais certains domaines bourguignons, souvent initiés par une nouvelle génération de vignerons, ont choisi de s’affranchir des dogmes pour embrasser une approche plus naturelle. Pour ces viticulteurs, travailler sans sulfites ajoutés est une manière de révéler l’essence du terroir bourguignon, sans artifice. Une philosophie audacieuse qui séduit de plus en plus, notamment à l’export.

Une exigence technique renforcée

Produire un vin sans sulfites ajoutés est un véritable défi. Pourquoi ? Parce que le SO2 constitue une sorte de “parapluie” qui protège le vin tout au long de sa vie. Sans cette protection, le vin est plus vulnérable à l’oxygène et peut développer des altérations non désirées comme des bretts (bactéries responsables de goûts qui évoquent l’écurie) ou des notes vineuses oxydatives.

En Bourgogne, où la spécificité des climats (terroirs uniques) est une fierté, cette entreprise est encore plus délicate. Le climat bourguignon est instable : un millésime trop humide ou marqué par des maladies cryptogamiques (comme l’oïdium ou le mildiou) peut être un véritable obstacle pour les raisins destinés au vin nature. Par conséquent, seuls les vignerons ayant une précision quasi maniaque dans leur travail, de la vigne à la cuve, parviennent à réussir des vins nature en Bourgogne capables de rivaliser avec les classiques.

Zoom sur quelques domaines pionniers

  • Frédéric Cossard : Ce vigneron est une figure incontournable pour quiconque s’intéresse aux bourgognes sans sulfites ajoutés. Son approche non interventionniste donne naissance à des vins d’une pureté remarquable, où le fruit éclate littéralement en bouche.
  • Julien Guillot – Domaine des Vignes du Maynes : Située en Côte Mâconnaise, cette propriété certifiée biodynamique depuis plus de 20 ans produit des cuvées sans sulfites qui incarnent une pureté exemplaire, tout en respectant profondément les traditions bourguignonnes.
  • Catherine et Claude Maréchal : Le duo élabore des vins naturels mettant en valeur les appellations de la Côte de Beaune, avec une superbe précision et élégance.

Quel goût ont les bourgognes sans sulfites ajoutés ?

Une caractéristique centrale des vins sans sulfites ajoutés, et notamment ceux de Bourgogne, est leur impressionnante vitalité. Les journées où j’ai eu la chance de déguster ces cuvées révèlent une explosion de fruits au nez et en bouche, souvent accompagnée d’une trame minérale bien présente. L’absence de SO2 permet une expression plus "libre" du vin, même si cela peut nécessiter une approche légèrement différente pour la dégustation.

Attention, cependant, ces vins demandent parfois un peu plus de bienveillance. Certains bourgognes sans sulfites ajoutés peuvent montrer une légère réduction (des arômes un peu fermés au départ), mais cela disparaît rapidement à l’aération. Si vous aimez les vins vivants, vibrants et d’une grande fraicheur, vous pourriez bien être conquis par ces pépites nature.

Leur reconnaissance parmi les grands : encore un chemin à parcourir

Malgré des efforts remarquables de nombreux vignerons, les bourgognes sans sulfites ajoutés peinent encore à se faire une place au sommet des crus les plus prestigieux. Pourquoi ? D’une part parce que le monde des vins de Bourgogne reste très ancré dans ses traditions et attaché à des standards de production précis. D'autre part, les vins nature, avec leurs variations parfois marquées selon les millésimes, bousculent les critères conventionnels de stabilité et de régularité.

Cela dit, une chose est sûre : ces vins attirent un public de plus en plus large, y compris dans le cercle des amateurs avertis. Des tables gastronomiques de renom commencent à les inclure dans leur carte, signe que leur potentiel est pris au sérieux. Et à mon sens, c’est là que réside leur force : ils interpellent, étonnent, et incarnent une vision moderne et engagée du vin.

Vers une nouvelle définition de la grandeur ?

Alors, les bourgognes sans sulfites ajoutés ont-ils gagné leur place parmi les grands ? Tout dépend de la définition que l’on donne à la grandeur. Si l’on considère celle-ci comme un mélange de prestige historique et de standards éprouvés, il reste peut-être du chemin à parcourir. En revanche, si être grand signifie refléter un terroir dans toute son authenticité, respecter l’environnement et s’inscrire dans une démarche novatrice, alors, la réponse est un « Oui » retentissant.

Pour ma part, je suis curieuse et enthousiaste de voir comment ces cuvées évoluent, notamment avec l’arrivée de nouvelles générations de vignerons en Bourgogne. Et vous, avez-vous eu l’occasion de déguster un bourgogne sans sulfites ajoutés ? Si oui, je serai ravie de lire vos impressions dans les commentaires !

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